Archives de catégorie : Publications

Anne-Michèle Hamesse – Bella disparue

Anne-Michèle Hamesse écrit. Avec passion. Des romans d’amour. Car, dit-elle, nous en sommes tous les acteurs. Ses lecteurs, et en particulier ses lectrices, sont de plus en plus nombreux à s’y reconnaître.

Clément attend Bella. Désespérément. Mais pourquoi, entre deux tasses de thé, Madeleine, l’inquiétante vieille voisine de son amie, souhaite-t-elle absolument lui parler de sa vie et de ses amours ? Et surtout de sa soeur, cette Hortense détestée qui, séduisante jeune femme dans le Congo des années trente, ressemblait tant à Bella disparue ?

Les premières lignes
Monsieur Derwiche, professeur d’aquarelle, avait coutume de répéter à ses élèves : «Je n’ai plus ri depuis que je suis marié ». Son épouse, quant à elle, affirmait à qui voulait l’entendre : «Mon mari n’a que des défauts, je ne lui reconnais qu’une seule qualité : quand il prend un bain, il rince très bien la baignoire». C’est à Albert Derwiche que Clément pense, ce matin-là, en quittant sa chambre de la rue du Coq. Il vient de découvrir le nom du professeur d’aquarelle dans les nécrologies du jour. La veuve du trépassé y annonce sa profonde douleur. Clément songe que plus aucune occasion […]

Yvon Givert – La Serafina

Yvon Givert, né en 1926, est poète, nouvelliste et auteur dramatique.Il a déjà publié chez Luce Wilquin un recueil de nouvelles, «Un Billet pour l’Australie» (1995), et un roman, «Le Jardin des Cyclopes» (1996).

Serafino, Serafina, c’est ainsi que l’on désigne en italie tout individu bizarre, du simplet au poète et à l’hurluberlu, et que l’on affuble du même nom le village qui l’abrite. Effi, Max et Stéphanie le découvriront après bien des péripéties étranges, cocasses, farfelues, qui rappellent le rythme trépidant des comédies américaines. Écriture, intrigue et construction – voilà du pur Givert… et un vrai régal !

Les premières lignes
Ce dont je suis sûr, c’est que les olives étaient noires. La femme, je m’en souviens, portait une robe de soirée, ample, légère, de couleur cerise, et par l’échancrure du corsage, on voyait juste entre les seins une tache de son qui ressemblait à un épi mûr. C’est vers cet épi que j’ai craché, disons expulsé sans bruit, sans salive, le noyau d’une olive que je mâchonnais depuis dix minutes au moins. Le noyau a décrit dans l’air une parabole parfaite, un arc tendu, de ma bouche à ce vallon humide entre les seins.La peau, soudain, s’est enflammée. La gorge, les épaules. La bouche […]

Monique Thomassettie – Triptyque

Monique Thomassettie déploie parallèlement une oeuvre de peintre et d’écrivain. Dans le domaine de l’écriture, elle s’exprime par le conte, la nouvelle, le poème, le théâtre et le journal. Elle a déjà publié, chez le même éditeur, Un Voyage ou le journal d’un peintre en 1993, Verbes-Oriflammes en 1995 et Le Maître d’Or en 1996.

«[…] la Poésie que je veux pratiquer […] essaie d’intégrer écritures «automatiques» et lucidité ou connaissance de soi. Cette Poésie-là refuse les confusions. La perception sensuelle est cernée par la réflexion. Mais cette apparente austérité n’empêche pas d’écrire comme un «lys des champs». Voie royale semée d’épreuves. Épreuves qui ressemblent parfois à des pièges. Les pièges sont-ils une fois pour toutes dépassés? Il ne faut, en tout cas, jamais confondre le piège qui rend sauvage la petite bête et celle-ci dont les plumes ou les poils se mêlent au filet. Ce sont les pièges du Monde. Ce Monde simple et compliqué, si vaste et si petit, qui nous ressemble.[…] Je fonctionne moins par érudition que par intuition: je veux dire par là que mon (relatif) savoir acquis n’a de sens que lorsqu’il rejoint et confirme ma connaissance innée, infuse. Ce n’est pas égocentrique si la créativité en résultant s’ouvre sur « le monde et les dieux ».» [Monique Thomassettie]

Les premières lignes
L’Ange Diagonale
Diagonale un ange me tire de la nuit sourde
C’est un ange vertical
Lumineuse diagonale d’un cercle d’ombreà ne pas dépasser
Perdant l’Obscursans déchirure
je vois la nuit de Dieu
où je m’abats la joue contre
Sa porte
Le Doute éclipse l’Ange
Qui en déchoit ?
Le silence de Dieu est exil
De Dieu le silence est exil
Et les arbres sont mornes
Un couple gourmand déjà porte la marque de la chute
Le ciel est d’un gris arrêté
La chute mène au sommetÉclipse d’ange
Ce serait bien la mort
La Porte colossale s’éloigneraIl soufflera des plumes

Gérard Adam – Le vol de l’oiseau blanc

Gérard Adam, médecin de formation et auteur prolixe, a obtenu le Prix NCR de la Vocation littéraire pour son premier roman, L’Arbre blanc dans la forêt noire, et figuré parmi les finalistes du Prix Rossel 1992 avec La Lumière de l’Archange.

Hervé Leriche, informaticien brillant, cultive l’échec avec tendresse et rigueur, en esthète, comme d’autres les chrysanthèmes ou les bonsaïs. Au bord du gouffre, dans un cul-de-sac professionnel et rejeté par son épouse, il se réfugie dans les brumes et sous le crachin d’Étretat pour réfléchir sur l’existence, la sienne et celle des autres. Il y connaîtra des amitiés réelles ou de circonstance, des rancoeurs inexplicables, mais surtout une passion fulgurante avec une artiste-peintre, avant de retrouver, rasséréné, une vie quotidienne sans surprise. Ce roman, le cinquième de Gérard Adam, est aussi son dixième ouvrage publié.

Les premières lignes
Un soir de printemps, nous avons côte à côte assisté au spectacle féerique d’une fonte de brume à Étretat. Le site, complètement voilé l’instant précédent, s’est révélé soudain dans sa fascinante splendeur.Le lendemain, tandis que nous nous promenions sur la falaise d’Amont, tu m’as demandé de te laisser seule et je suis allé m’asseoir au bord du vide, à écouter les cris des goélands. Je te voyais, au loin, esquisser un tableau sur une feuille arrachée à un carnet.Après, tu m’as parlé de ce que tu nommais  » l’âme d’Étretat « . Ce livre a trouvé sa source dans ce que tu m’as dit ce jour-là. […]

Collectif – Du Lit au Ciel

La collection Noir Pastel, collection de littérature noire voulue et dirigée par Les auteurs du recueil collectif : les Français Olivier Mau, Olivier Thiébaut, Jean-Claude Schineizer, Jacques Vettier, Jean-Jacques Reboux, Robert Deleuse, Sylvie Granotier et Gérard Delteil – auteurs chez Baleine, chez Métailié et à la Série Noire -, notre Française de Belgique Pascale Fonteneau, les Belges Bruce Mayence, Pierre Guyaux-Genon, Xavier Hanotte, André-Paul Duchâteau, Jean Flament, Fank Andriat, Gilbert Mérague et Alexandre Lous, qu’il est inutile de présenter…

La collection Noir Pastel, collection de littérature noire voulue et dirigée par Bruce Mayence, se place sous le double signe de la qualité (fond et forme) et de l’amitié (de très nombreux auteurs français et belges ont sans hésiter adhéré d’emblée au projet de leur «ami Bruce»).Si le roman policier met en scène une enquête qui se déroule sous les yeux du lecteur, le roman noir (ou la nouvelle noire) saisit des personnages en situation de crise, face à une existence qu’ils assument plutôt mal que bien, avec son lot de frustrations, de rancoeurs ou d’échecs. En fait, le roman noir, c’est le fameux «franchissement de la ligne» de Simenon, ligne en deça de laquelle restent la plupart des individus et que seul le héros de roman noir a la lucidité ou la faiblesse d’outrepasser. Il devient à ce moment-là acteur – et non plus spectateur – du destin qui lui est échu, et dès lors assume sa descente aux enfers : c’est là la couleur noire du roman.Les textes de cette collection ne plongent jamais dans la violence et l’abjection gratuites, mais, si violence il y a, celle-ci sert toujours à dénoncer les travers d’une société déboussolée.Du lit au ciel, de l’amour à la mort… Les auteurs de ce recueil sont : les Français Olivier Mau, Olivier Thiébaut, Jean-Claude Schineizer, Jacques Vettier, Jean-Jacques Reboux, Robert Deleuse, Sylvie Granotier et Gérard Delteil – auteurs chez Baleine, chez A.-M. Métailié et à la Série Noire -, notre Française de Belgique Pascale Fonteneau, les Belges Bruce Mayence, Pierre Guyaut-Genon, Xavier Hanotte, André-Paul Duchâteau, Jean Flament, Frank Andriat, Gilbert Mérague et Alexandre Lous, qu’il est inutile de présenter…

Les premières lignes
J’ai pris un engagement, ici, à Mons, en refermant mon Plisnier.Et ils passent tous, sans me voir ! S’il savaient… Je les vois déjà tous, ces vieilles bigotes qui râlent parce qu’on a fermé le beffroi au public, parce qu’elles ne sont plus jeunes, parce qu’elles sont vieilles, parce qu’elles vont crever, elles s’en iraient en ratiocinant ; les hommes, ce troupeau en éternelle transhumance vers un quelque part sans penser qu’il […]

Jacques Lefèbvre – Comme un veilleur…

Jacques Lefèbvre, docteur en philologie romane avec une thèse sur la versification claudélienne, enseigne le français depuis 1966. On lui doit de nombreuses critiques littéraires et communications pédagogiques, ainsi que des nouvelles parues dans différentes revues. «Comme un veilleur…» est son second roman, après «Chambre 404», publié en 1982.

Le célèbre Fabian Favre, coqueluche des galeristes et des critiques gît sur un lit d’hôpital après un accident de voiture… Mal en point, mais surtout aveugle. Le comble pour un peintre ! Un cassettophone, déposé par une main amie (aimante?) sur son lit de douleur, le sauvera du désespoir et lui permettra de renouer les liens de la communication, mais surtout de faire le point sur une vie toute d’apparences. Huit cassettes, et quelques mois plus tard, Fabian Favre – qui a retrouvé une vision floue après une opération réussie – peut enfin envisager son existence sous un autre jour, plus serein. Une écriture simple et heurtée, comme la vie, où la douleur et le mal-être affleurent avec une pudeur à la violence feutrée.

Les premières lignes
1re cassette face A. 1re séquence. Tu savais donc que je t’attendais, que je reconnaîtrais tes pas dans le couloir; tes pas, différents des autres! La porte de la chambre s’est ouverte. Un souffle m’a frôlé. Tu t’es penchée. Toi… Ton parfum. Le même, après un an. Celui qui imprégnait l’écharpe que tu m’as laissée à la fin de notre dernière promenade. J’ai souri. Les muscles ont frémi sous ma peau recousue. Cela tirait. Cela brûlait. Mais c’était bon, ce feu, en ce jour de Noël; une joie folle, inespérée! J’ai souri, pour la première fois depuis que je suis sorti du coma.

Thomassettie Monique – Le Maître d’Or

Une année, une série de lettres… Une femme amoureuse choisit de se donner à celui qu’elle aime et qui se trouve au loin à travers l’écriture et le récit de sa vie.

Les premières lignes
Mon amour,«Puisque je n’ai pu te saisir, te dévêtir, que m’obsède ton corps tant désiré, jamais vu ni touché, ôte les voiles de ton mystère, donne-moi la nudité de ton passé…», m’écrivais-tu dans ta première lettre. «Chacun de tes mots me sera baume et caresse.» Depuis ton départ, le vertige, le tournis permanent que je connaissais avant nos aveux amoureux, m’ont reprise, me minent. Sans doute, me donner à toi à travers mes lignes m’apaisera le temps de les écrire, et te comblera le temps de les lire. La distance émoussera-t-elle cette rare empathie qui d’emblée nous a unis?

Françoise Pirart – Les Uns avec leur amour

Françoise Pirart, qui nous propose ici son quatrième roman, est passée maître dans les atmosphères glauques et oppressantes. Elle a déjà publié un roman ( Le Décret du 2 mars) et un recueil de nouvelles (L’Oreiller) chez le même éditeur.

Nathan Goldblum, professeur de philosophie au lycée de Mirebourg en Charente-Maritime, est en fait un être faible, totalement prisonnier de l’emprise de sa mère au passé mystérieux. Lorsque l’audace d’un amour tout neuf lui fait introduire Sarah dans leur univers confiné, cette intrusion va raviver des rancoeurs anciennes, lever le voile sur d’honteux souvenirs soigneusement enfouis et déclencher un engrenage infernal, dont il sera le seul rescapé… mais coupable, forcément coupable !Une écriture simple et efficace, une atmosphère étouffante, un univers comparable à celui des meilleures écrivaines anglo-saxonnes.

Les premières lignes
Debout devant la fenêtre, le front appuyé à la vitre, les yeux à demi fermés, il revoyait la scène dont chaque détail se précisait à l’extrême. Sarah, assise sur la banquette verte du compartiment de train, les mains entrouvertes posées sur la jupe, les genoux serrés, les talons joints et les pointes des pieds légèrement écartées, le buste très droit, la nuque rigide. Ses cheveux étaient longs et raides, et, sur son front, des mèches blondes se dressaient bizarrement. On aurait dit qu’elle portait une perruque bon marché, une mauvaise imitation.

Corinne Jaquet – Le Pendu de la Treille

Politologue de formation, Corinne Jaquet entre en 1983 au quotidien La Suisse, au sein duquel elle a assumé pendant longtemps la rubrique «faits divers» et la chronique judiciaire. Pour ce journal, puis pour l’agence AP, elle a passé dix ans au Palais de Justice de Genève. Cette expérience et un travail quotidien au contact de la police l’ont tout naturellement poussée vers le roman policier.

Au lendemain de son élection au gouvernement genevois, Georges Bertin est retrouvé pendu à un arbre de la Treille, sous les fenêtres de l’Exécutif de la ville. La stupeur fait vite place aux soupçons. Les opposants politiques seraient-ils allés jusque-là pour récupérer une parcelle de pouvoir ? Le mépris de Bertin pour ses confrères avocats serait-il à l’origine du drame ? Sa jeunesse dans la Genève des années 50 ne cache-t-elle pas un terrible secret ? L’inspecteur Simon mène l’enquête entre avocature et politique, dans ce monde où une certaine pudeur calviniste cache bien des travers…

Les premières lignes
La Gazette, article de Une pour édition du 16 novembre 1989 : Victoire totale de l’Alliance genevoise. Les 7 Conseillers d’État étaient sur la même liste !(J.D.) – Les parieurs ont perdu. Personne n’aurait pensé, il y a deux jours encore, à un tel succès pour l’alliance de droite. Tout le monde, ou presque, misait sur un gouvernement identique au précédent, formé de trois membres de la gauche et de quatre représentants de la droite. Et voilà que l’alliance genevoise, regroupée sous l’appellation genève : debout ! vient tout rafler ! C’est une révolution, un coup de tonnerre dans […]

Ursula Gaillard – Le Rouge-gorge

Ursula Gaillard, née en 1947, vit en Suisse romande. Traductrice de Nicolas Meienberg et d’autres écrivains alémaniques, elle est l’auteur de plusieurs essais historiques («Femmes et syndicats», 1980, et «Retards de règles», 1983, en collaboration avec Annik Mahaim ; «Mieux qu’un rêve, une grève», 1991) et d’un récit, «Paysage arrêté», paru en 1986.

Anita arpente les couloirs souvent enchantés des années 1970, sur les traces d’une femme ayant un penchant certain pour l’utopie. L’intérêt pour les méandres de l’histoire occupe une grande place dans ce récit, qui est aussi la chronique d’une angoisse, celle de l’oeil postérieur du diable…«Non pas cela, quelle heure est-il ? Non, les aiguilles ne tomberont pas, le temps te restera fidèle, tu ne lui échapperas pas, mais s’il te plaît, ne lui colle pas tout de suite un journal sous le bras, reviens au temps bonhomme, celui de tous les jours, celui qui sent le café et la châtaigne. Le temps de l’histoire, on le planquera sous le lit pour un moment, laisse-le se reposer un peu de toi, il doit être claqué lui aussi. Quatre heures du matin, Jean m’avait pourtant promis d’appeler dès qu’il aurait des nouvelles. Qu’est-ce qu’il fout ?»

Les premières lignes
Il pleut à verse. Plus bas, la route se transforme en torrent. Dans cette vallée, les changements de pente sont brusques. Impossible de sortir. Je m’installe devant mon ordinateur. Une notice de dictionnaire à rédiger. Pourvu que je parvienne à respecter mon délai.Un bruit mat cogne contre la vitre. Je lève les yeux. Une petite tache. J’entrouvre la porte-fenêtre. C’est un rouge-gorge. Détrempé, mais encore chaud. Je le ramasse. Fichu temps. «Foutu pays», aurait-elle dit. Et l’oiseau… Venir s’assommer ici au moment même où je dois résumer seule les grandes lignes d’une biographie que […]

Roger Foulon – Histoires de bêtes

Roger Foulon, né en 1923, a déjà publié de nombreux recueils de poèmes, essais, pièces de théâtre, contes, nouvelles et romans. Animateur de plusieurs revues littéraires, il a présidé pendant plus de vingt ans l’Association des Écrivains belges de langue française. Certains de ses textes ont été traduits.Son roman L’Homme à la tête étoilée, paru chez Luce Wilquin, fut finaliste du Prix Rossel 1995 et a reçu le Prix Sander Pierron 1996 de l’Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique.

«Des nouvelles à la limite du fantastique, où les cerfs, les lièvres, les grenouilles, les pingouins, les taupes, les truites… et même des rats musqués jouent les vedettes.Animaux de chair ou objets d’art prenant soudain vie, ils envahissent les fantasmes des humains ou bousculent leur quotidien. Mais la poésie et l’émotion sont toujours au rendez-vous… […] Les bêtes qui constituent ces histoires ne courent pas toutes les bois, et c’est bien ce qui fait la variété de ce livre. Des cerfs sculptés sur un bracelet scythe, le chien de saint Roch sur une fresque ou des fourmis «taguées» sur les murs d’une ville titillent autant l’imagination que l’écureuil aperçu par la fenêtre ou le singe acheté chez un marchand.» [Jean-Claude Bologne, Tageblatt ]

Les premières lignes
À Kiev, le monastère prestigieux de la Laure fait toujours recette. Une foule énorme stationne sans fin devant le porche : gens de la ville, certes, mais surtout anciens kolkhoziens venus des campagnes d’Ukraine et touristes des quatre coins du monde.Alla, leur guide, les avait laissés un moment pour prendre les tickets. Puis, elle les avait conduits dans la cour intérieure. On parlait ici toutes les langues. Il aurait voulu s’attarder un peu pour admirer les fresques, le campanile de Pétcherskaïa et ce qui restait de l’église de la Dormition. Mais Alla les menait comme […]

Françoise Lison-Leroy – Dites trente-deux

Françoise Lison-Leroy, poète et nouvelliste, porte un regard lucide sur les pages d’enfance, instants d’ailleurs et d’ici.

«Après Histoires de Petite Elle, voici trente-deux poèmes pour arpenter l’âge blanc et ses chemins frondeurs. Secrets, brisures, petites joies singulières: faits et paroles d’aujourd’hui. […] Le ton est simple. Les phrases souvent brèves ont le rythme d’une existence au galop. Les mots sont puisés au journalier. Les verbes ont opté pour le présent qui se vit et le futur qui porte au loin vers une génération pour demain.» [Michel Voiturier, Le Courrier de l’Escaut]

Les premières lignes
Quatre fois eux
le Père Noël n’existe pas
ceux d’Emmaüs n’existent pas
ni les oignons de Mulhouse
ni les Allemands et leurs VW
La télé montre en vrai le goût du pain vermine, les moustiques du Gange et les étangs rouillés.
Les journaux affichent – gris et blanc – l’alphabet de la faim.
Au foyer municipal, cent bottines attendent qu’un avion les décolle.
L’argent de mes étrennes a une odeur de talc.

Les abonnés absents
Le clown a défait sa chaussure.
Un faux lacet barre sa main.
Il trace une marelle, arrive au paradis.
Ça fait un trou.
Il s’y enfonce et on ne le voit plus.