Alain van Crugten – Korsakoff

Professeur de littérature comparée et de littératures slaves à l’Université libre de Bruxelles, Alain van Crugten s’est longtemps cantonné à la traduction littéraire, publiant en français les œuvres théâtrales et romanesques de Witkiewicz, divers romans de Hugo Claus (dont le Chagrin des Belges) et son théâtre, d’autres auteurs polonais (Mrozek), russes (Zinoviev), tchèques (Capek), anglais et néerlandais (Tom Lanoye). Sur le tard, il s’est lancé dans le théâtre (huit pièces), puis le roman (Des fleuves impassibles, Spa si beau et maintenant Korsakoff).

Le narrateur est atteint du syndrome de Korsakoff, les vingt ou trente dernières années de sa vie ont disparu de sa mémoire, et il compense cela par une fantastique activité de fabulation. C’est dire qu’il peut avoir (ou non!) inventé une partie de sa jeunesse, mais que tout son âge adulte est résumé en des récits fabulés qui ont plus ou moins de cohérence. Alors vraie, la perte du pucelage à 13 ans sur un lit de roses? Vraie, sa participation à l’assassinat de John Kennedy? Vraies, ses missions dans les pays de l’Est? Ses rencontres avec des stars de Hollywood dans un hôpital?

Les premières lignes
Plus européen tu meurs. Polonais par ma mère, néerlandais par mon grand-père, corse par ma grand-mère, je suis né dans un faubourg de la future capitale européenne, un faubourg au surprenant nom germanique qui signifie Ruisseau-de-pus. J’ai revu à l’âge mûr ma clinique natale, qui portait, quant à elle, le nom d’un philanthrope baron banquier: en constatant l’état des lieux, je ne fus plus étonné: le pus devait vraiment y ruisseler, sinon cascader dans les escaliers. Léon van Cureghem, mon père, avait, selon la tradition familiale et l’histoire non écrite, fait la connaissance de Charlotte Karmazyniella Thomm par une soirée bruyante de kermesse.

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