Colette Nys-Mazure, accordée au vivant – Mathieu Gimenez

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Écrire la biographie de Colette Nys-Mazure est une gageure. Sa vie transparaît dans tous ses écrits. Chaque essai, chaque poème, chaque recueil de nouvelles est nourri de ses expériences. Sans entrer dans le jeu de l’autofiction, elle se livre et se laisse lire à travers ses phrases qu’elle travaille avec amour et exigence. Cette biographie, Colette Nys-Mazure l’écrit et la vit au jour le jour, ajoutant chaque année de nouveaux textes et de nouvelles expériences à une œuvre d’une richesse féconde. La figure de Pénélope s’impose ici tant la volonté de tisser des liens et de susciter des échos est présente chez l’auteure de Célébration du quotidien. Tout est lié, le vivant s’imbrique dans le vivant. Cette monographie recherche ce regard en tentant de mettre au jour le rythme intime de l’œuvre et des mots qu’il nous appartient de faire résonner.
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Les premières lignes
Quiconque voudrait comprendre Colette Nys-Mazure devrait commencer par se rendre au Mont-Saint-Aubert, de préférence un lundi de Pâques pour la Marche à Baton. Contrairement à ce que le nom de ce lieu pourrait laisser croire, ce n’est pas une montagne, ni tout à fait une colline. La Belgique n’aime pas ces hauteurs narquoises. Contemplez le Mont-Saint-Aubert et vous aurez l’impression que le paysage hausse les épaules et vous fait un clin d’œil. On vous incite à grimper. Au Mont-Saint-Aubert, il vous faut laisser le village et la rue du Reposoir pour emprunter le Chemin des Poètes. Ce petit sentier est jalonné de pierres bleues gravées sur lesquelles les promeneurs sont amenés à lire les citations des poètes de la région. Parmi elles, la voix de Michel Voiturier se fait entendre : « Chaque rencontre m’est aube ». Colette Nys-Mazure lui répond par des vœux de vie : « Célébrer les silences et leur ouvrir les ailes ». À l’issue de ce sentier, le promeneur peut rejoindre le Jardin des Poètes. Inauguré à l’occasion du quatre-vingtième anniversaire de son mécène Géo Librecht, ce jardin réuni les sépultures de neuf poètes de l’association Unimuse. Il forme « un arc de cercle où viennent se placer les tombes individuelles en éventail, orientées vers la France » expliqua son mécène. Sur la dernière de ces neuf tombes, le promeneur lira ceci : « Colette Nys-Mazure 1939- / Tendre à travers mots une main Et traverser la nuit sans mourir ». Cette tombe, insolite aux yeux de certains, plaît assez à Colette Nys-Mazure qui y amène volontiers ses visiteurs. Elle y prend par ailleurs un malin plaisir qui parle à sa place. La mort fait partie de la vie de Colette Nys-Mazure. Née en 1939, elle connaîtra les horreurs de la guerre et sa violence. Elle n’oubliera jamais la douleur des femmes rasées et le retour des soldats. À l’âge de sept ans, le deuil précoce qu’elle doit porter fait d’elle une orpheline, marquée aux yeux de tous par la couleur de son vêtement. De cette période, elle gardera une angoisse chevillée au corps et un goût définitif pour la vie et ses joies. Aidée par ses proches et par la religieuse Sœur Marie Tarcisius, elle ne succombera ni à l’amertume ni à la rancœur. Elle vivra accordée au vivant.

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Les notes de Jimi H. – Thilde Barboni

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Woodstock, 1969. Manuel, un jeune guitariste surdoué, disparaît après avoir reçu une photo de Jimi Hendrix avec, en dédicace, les notes du fameux Star Spangled Banner.
Bruxelles, 2013. Sa cousine Roxane affronte, épouvantée, la disparition de son propre fils Neil, dix-huit ans, dans des circonstances troublantes et similaires.
Pourquoi Neil a-t-il fait semblant de déchirer et brûler la photo de Hendrix avant de partir ? Pourquoi ses copains protègent-ils farouchement sa « fugue » ? Jusqu’où ces jeunes sont-ils prêts à aller pour le couvrir ? Quel rôle les réseaux sociaux jouent-ils dans cette disparition ?
Roxane, désemparée et confrontée à l’inertie de la police, va engager un détective privé et fouiller dans le passé de Manuel. Son adoration pour lui l’a toujours empêchée de voir la réalité en face et a entravé toute possibilité de dialogue avec Neil.
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Les premières lignes
« Hé, vous avez entendu les news ? Votre z’héros est mort ! »
J’ai de plus en plus de mal à supporter mon fils déboulant dans la cuisine, les oreilles coiffées de protubérances grotesques, le menton en avant, les yeux plissés, les mains collées sur la porte, rabattue à grand fracas. Il occupe tout l’espace, hurle une phrase provocatrice, n’attend aucune réponse et tourne les talons.
La semaine dernière encore, je me serais précipitée pour lui arracher le casque tagué de gribouillis informes, j’aurais émis une réplique cinglante, immanquablement suivie d’un sentiment honteux de colère contre moi-même. Aujourd’hui, mon visage, mes cordes vocales sont tétanisés. Mon corps réagit à l’agression par une passivité résignée. C’est loin d’être un progrès ! Pourquoi suis-je incapable de me contrôler face à ce qui n’est, somme toute, qu’un adolescent ? Depuis qu’il m’a lancé un « Tu t’es vue quand tu gueules ? » ponctué d’un index visant le grand miroir du hall, la vision d’une femme d’âge mûr, le corps arqué, le front ridé, les lèvres pincées par les reproches, me poursuit et fige toute tentative de réaction spontanée.

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À rats qui rient, raies qui aiment – Justine Lalot

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À rats qui rient, raies qui aiment est une messe pour les morts un peu particulière. N’y seront célébrés que ceux qui se sont un jour illustrés par la stupidité de leur trépas. Un plongeur retrouvé empalé au faîte d’un sapin, une miss qui se noie dans un mètre d’eau à Knokke-le-Zoute, une violoniste à l’archet un peu trop vigoureux, etc.
Le chef d’orchestre de cette vaste fumisterie, c’est Simon Faucher. Écrivain raté, il n’a pas hérité du génie de Wolfgang Amadeus Mozart. À cent trois ans, il serait en effet présomptueux de se vanter d’un talent précoce ! Pourtant, Simon Faucher n’hésite pas à se revendiquer du musicien autri­­chien : comme Mozart, il va défier la mort, baptisée Jeanine pour l’occasion. Le vieil homme espère bien qu’en échange la grande faucheuse daignera s’occuper de son cas. Mais n’est pas Mozart qui veut…
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Les premières lignes
En ce premier avril, on pourrait croire à une blague. Pourtant ce n’en est pas une. Enfin si, mais elle dure depuis plus de cent ans. Alors elle ne fait plus rire grand monde.
Sûrement pas lui. Lui, c’est Simon Faucher. Ce premier avril 2014, il fête ses cent trois ans. Bien que « fête » ne soit pas le terme le mieux choisi ; « subit » serait plus adéquat. Si je m’évertue à le préciser, c’est parce qu’à cent trois ans, on n’a plus vraiment envie de s’ennuyer avec des bêtises. Or, ce qui se passe ce 1er avril 2014 n’est rien d’autre qu’une pitrerie. Une pitrerie énorme, certes, mais rien de plus.
À cent trois ans, Simon Faucher n’attend plus rien de la vie. Il attend par contre la mort avec une impatience peu dissimulée. Thérèse, sa merveilleuse Thérèse, ses mains délicates, son sourire, ses lèvres fines, l’attendent au-delà du Styx depuis cinq ans déjà. Cinq longues années passées à se morfondre, à se dire chaque matin au réveil que son heure est venue ; à constater avec dépit au coucher qu’il n’en est rien. Car, malgré ses multiples sollicitations, Simon Faucher ne peut que déplorer le fait que Jeanine – c’est comme ça que, dans son intimité, il a baptisé la grande faucheuse – ne vient pas. Jeanine le fuit même comme la peste et toutes les autres maladies qui, dans le meilleur des mondes, auraient déjà eu raison de lui. Et ça le déprime, Simon Faucher, vous ne pouvez même pas imaginer à quel point ça le déprime !

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Une Symphonie Or – Philippe Cantraine

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Juin 1940. Les réserves d’or de la Banque Nationale de Belgique, confiées à ce qui est encore la République française, et embarquées dans l’urgence pour le Canada, son allié, sont aussitôt détournées vers la colonie d’Afrique-Occidentale française par le gouvernement de Vichy. En octobre, la conférence franco-allemande de Wiesbaden s’accorde sur la cession de l’or belge à l’Allemagne, pour financer son effort de guerre, et le renvoi des caisses à Berlin.
Les autorités de l’AOF exécutent sans rechigner le plan convenu. Cependant, les Anglais surveillent l’océan. Le transfert prendra dix-huit mois et vingt-quatre convois avant que la totalité des deux cent vingt tonnes d’or gagnent Alger par le fleuve Niger et par le Sahara, avant d’atteindre la capitale du Reich.
Dès lors, que font ces inspecteurs allemands des devises sur les flancs des convois ? Préparent-ils autre chose ? Georges Cartuyvels, géologue dans la colonie belge du Congo, collectionneur d’art africain et qui plus est anticolonialiste, est enrôlé pour la bonne cause et va tenter de le savoir…
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Les premières lignes
« Y a-t-il encore des difficultés pour l’or belge ?
– Oui ! répondit Bouthillier sèchement. La position allemande n’est d’ailleurs pas défendable… » La question de l’or belge, dès octobre, les nazis l’avaient abordée, à Wiesbaden, lorsqu’il fallut discuter des conditions de l’armistice. L’occupant allemand y étalait ses griefs à l’endroit de la Belgique emportée en dix-huit jours, mais dont le gouvernement, désolidarisé du roi, poursuivait à Londres la lutte.
Le vice-président du Conseil ne laissa pas passer. Il répliqua vertement : « Il ne s’agit pas de savoir si elle est défendable, mais si ma politique exige que je leur donne satisfaction. Je ne vous dis pas que cela sera fait. Je vous dis que c’est fait ! »

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À vos agendas !

Les occasions sont nombreuses de rencontrer nos auteurs durant ce premier trimestre 2014 !
févtrio
Geneviève Damas (Benny, Samy, Lulu et autres nouvelles) sera :
– le 15 février à 16h à la librairie À livre ouvert (Bruxelles)
– le 20 février à la Bibliothèque de Waremme (B)
– le 25 février à 18h30 à la librairie Pax (Liège)
– le 28 février de 18h à 20h à la librairie Tropismes (Bruxelles)
– le 7 mars à 20h à la Bibliothèque de Clermont-Thimister (B)
– le 21 mars en soirée au Centre culturel de Nethen (B)
– le 25 mars à 18h au Béguinage de Lauzelle (B)
– le 27 mars à la librairie Calligrammes de Wavre
Valérie Cohen dédicace Alice et l’homme-perle :
– le 18 février à 18h à la librairie Filigranes (Bruxelles)
– le 22 février à 16h45 à la librairie Once upon a Time de Linkebeek (B)
– le 23 février à 19h30 à la librairie Le Petit Filigranes (Bruxelles)
Marie-Paule Eskénazi présente Son dernier saut :
– le 18 février à 18h à la librairie Agora de Louvain-la-Neuve (B)
– le 27 février à 18h30 à la librairie La Licorne (Bruxelles)
– le 1er avril à 19h30 la librairie Papyrus de Namur (B)
Sans oublier leur présence à la Foire du Livre de Bruxelles (20-24 février) en compagnie de nombreux autres auteurs «maison» et au Salon du Livre de Paris (21-24 mars).
À noter également que la Bibliothèque de Rhode-Saint-Genèse (B) reçoit Laurence Bertels le lundi 3 février dans le cadre des Lundis de la Bibliothèque. Monique Lambert l’interrogera sur son premier roman, La solitude du papillon.
Luc Baba (Les sept meurtrières du visage) sera présent le 12 février à 12 heures au Centre Wallonie-Bruxelles de Paris pour une rencontre sur les langues du monde, en compagnie de Laurent Gaudé. Une lecture du même texte aura lieu le 16 mars à 20h30 sur la scène du Blues Sphere (37, rue Surlet à Liège).
Et Daniel Charneux (Comme un roman-fleuve) sera accueilli le 22 février à la Bibliothèque de Frasnes-lez-Anvaing (B).
Luc-Michel Fouassier (Fragments d’un fait d’hier) fait, quant à lui, partie des écrivains invités au Salon du Roman historique de Levallois (F), le 9 mars de 14h à 18h30, dans les salons de l’hôtel de ville.
Quant à Françoise Pirart, elle présente son avant-dernier roman Sans nul espoir de vous revoir à la Bibliothèque communale de Frameries (40b rue de la Libération à La Bouverie, Belgique) le samedi 15 mars à 11h.

Alice et l’homme-perle – Valérie Cohen

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Alice, Juliette et Gisèle partagent leur quotidien dans une Résidence pour sexagénaires argentés de Saint-Germain-en-Laye. Lorsqu’elle commence à oublier la couleur des yeux d’un ancien amant, Alice sombre dans une profonde mélancolie. Hormis son époux décédé, Diego est le seul homme qu’elle ait jamais aimé. Pourquoi vivre encore si l’essentiel lui échappe ? Ses amies lui organisent alors un voyage surprise à Séville avec l’objectif inavoué de retrouver Diego. Un professeur de dessin taiseux, un juge vieux garçon et la sulfureuse directrice de la Résidence les accompagnent. Un périple cocasse, durant lequel leur propre histoire s’invite. Tout comme leurs désirs, leur envie d’oser de nouvelles routes. Leurs peurs aussi…
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Les premières lignes
Rome, 18 avril 1985
Congrès de Neurochirurgie
Chère Alice,
Je suis vraiment ravi d’avoir fait votre connaissance. D’ordinaire, les congrès médicaux sont bien plus ennuyeux et se promener dans Rome en votre compagnie a été un moment fort agréable. Je vous rends votre guide touristique oublié dans le taxi.
Si Arthur n’y voit pas d’inconvénient, je serais heureux de vous « emprunter » à nouveau, vous et votre guide, demain après-midi pour visiter la Villa Borghèse. Je vous attendrai à seize heures à la réception de l’hôtel.
Amicalement,
Diego Silva
(message laissé à la réception de l’Excelsior Congress Hotel pour Alice Romain)

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Son dernier saut – Marie-Paule Eskénazi

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Son dernier saut est une pure invention à partir d’un fait divers tragique qui a naguère impressionné l’opinion : une parachutiste a été condamnée à trente ans de prison pour meurtre, accusée d’avoir saboté le parachute de sa meilleure amie et rivale.
Marie P., journaliste professionnelle, reçoit un énigmatique courrier qui apporte une réponse totalement imprévisible à ce « sabotage amoureux ». Intriguée, elle va s’improviser enquêteur pour tenter d’authentifier l’auteur de l’envoi et comprendre ses motivations, puis confronter les révélations aux faits pour aboutir à un dénouement inattendu.
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Les premières lignes
Ciel bleu, température de saison, 18 à 21° le matin, pouvant atteindre 25° cet après-midi au centre du pays. Vent faible. Attention, nuit froide…
J’écoutais la radio d’une oreille distraite. Il était six heures du matin. La nuit était claire. Étendue sur mon lit, je voyais le ciel bleu par l’espace entrouvert entre mes tentures mal fermées. Un dimanche ordinaire commençait. En congé, j’avais l’intention de passer à la rédaction pour boucler un dossier. Je prévoyais de glander, un terme que mes enfants m’avaient appris à apprécier et pratiquer !
Après le bulletin météo réjouissant qui devait sans doute plaire au secteur touristique, s’égrenaient les titres du journal. Politique nationale, internationale : les évènements ne s’étaient pas bousculés pendant la nuit. Je repensai à cette perspective de nuit froide en plein mois d’août. Normal, me dis-je, puisque le ciel est bleu, pas de vent, pas de nuage, et donc toute la chaleur accumulée par la terre pendant la journée va s’échapper vers le ciel. Au petit matin, avant que les rayons du soleil soient suffisamment hauts pour réchauffer la terre, il fera frisquet ! Les notions de météo apprises durant mon écolage de pilote privé me revenaient à l’esprit. Ma passion pour l’aviation, à laquelle j’avais consacré temps et argent pendant des années pour mon plus grand plaisir, s’était éteinte avec l’accident mortel de mon frère, aux commandes d’un planeur.

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Benny, Samy, Lulu et autres nouvelles – Geneviève Damas

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Douze nouvelles, douze trajectoires de vie, douze moments où des êtres atteignent leur point de rupture. L’occasion de regarder les choses en face et, pourquoi pas, de prendre une trajectoire inexplorée, d’affronter ce qui fait peur, de larguer les amarres.
Élisabeth quitte précipitamment une réunion de famille pour aller acheter du wasabi, ‘Ma trottine le long d’une grand-route avec Benny, Jonas est sous l’emprise de son chat, Alice choisit d’enfoncer ses talons aiguilles dans la neige, Samy cherche quelqu’un à qui parler, un jeune professeur de français défend un projet théâtre face à un conseil de classe… Tour à tour, ces personnages prennent la parole, à leur manière, l’occasion de murmurer une vérité qui jamais n’a été dite.
Par l’auteur de Si tu passes la rivière, Prix Rossel 2011 et Prix des Cinq Continents de la Francophonie 2012
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Les premières lignes
«J’ai oublié le wasabi.» C’est ça que je leur ai dit : «J’ai oublié le wasabi, je cours chez le Japonais du coin de la rue et je reviens.» Ma mère a froncé les sourcils, «Tu es d’une distraction, Élisabeth, franchement.» «Je sais, je ne serai jamais bonne à marier, M’man. Bon, si vous mourez de faim, vous n’avez qu’à ouvrir le frigo, les zakouskis vous attendent sur la deuxième planche, pour les curieux, le gâteau est dans le bac à légumes.» Jean-Paul a souri. Et j’ai tourné les talons.
Évidemment que je l’avais acheté, le wasabi. Je pouvais vraiment leur faire gober n’importe quoi. Le wasabi, c’est ce qui me réveillait mieux que le café le matin et me tirait de l’abrutissement le soir. Seulement, ce jour-là, alors que depuis un mois je m’étais préparée à l’idée de cette soirée, « Ça peut être agréable, une famille », à l’image de ma mère déballant son cadeau d’anniversaire, à ses remarques cinglantes « Encore un livre, c’est original », au regard adipeux de Victor, le beau-père, toujours prêt à promener ses mains sur ma nuque et mes épaules « Détends-toi, Élisabeth, tu es si tendue », au sourire triomphant de ma sœur « Je ne me suis jamais sentie mieux qu’enceinte » et à la mine fatiguée de Jean-Paul, le beau-frère, quand je les ai vus arriver sur le palier, s’embrasser, se réjouir de cette soirée, parler de leurs vacances, du bébé, j’ai su tout à coup qu’il me faudrait prendre l’air, sortir quelques minutes, sous n’importe quel prétexte. Et le wasabi est le premier que j’ai trouvé.

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Passé simple – André Sempoux

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Fabuleuse, onirique, étrange, historique, triste, allègre, ou, comme dans la vie, tout cela à la fois, la nouvelle voudrait, les soirs d’une semaine, alléger par le plaisir de son architecture narrative et de son peu de mots les peines réelles et pensées parasites qui sont notre lot d’humains.
André Sempoux est romancier (Torquato, 2012, Dévoration suivi de Nuit blanche, 2013), poète et essayiste. Il a reçu en 2007 le prix Italiques et en 2010 le prix Alix Charlier-Anciaux, de l’Académie, pour l’ensemble de son œuvre de fiction.
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Les premières lignes
Rixensart
Dans l’espoir de me faire pardonner la goujaterie de samedi, laissez-moi, Madame, vous en raconter une autre, qui prit allure de feuilleton ; à fin heureuse, je vous rassure.
Plus de huit ans après la première guerre, l’épouse d’un professeur italien qui n’en était pas revenu reconnaissait son mari dans un amnésique dont la photo avait été publiée en désespoir de cause. On oublia ou voulut oublier que l’homme, avant sa collocation dans un asile, près de Turin, avait commis un vol. Le « professeur » et madame Canella retrouvèrent ensemble, à la joie générale, famille et enfants. Mais bientôt, suite à l’irruption d’une rivale dans ce jeune bonheur, une identité moins reluisante était attribuée au revenant.
Les procès commencèrent, non sans intrusion des autorités politiques et religieuses. Le pays se divisa en « canelliens » et « brunériens », adjectif forgé sur le vrai nom de ce simulateur. Il allait, jusqu’à sa mort au Brésil en 1941, jouer imperturbablement le rôle que le hasard lui avait offert sur un plateau d’argent. Il faut dire que la dame aimante et fortunée partie avec lui aux Amériques n’eut jamais la moindre défaillance dans son propre personnage, malgré la complexification de l’imbroglio légal et les progrès de la partie adverse. Quant au fruste Bruneri, il publia et fit en portugais des exposés dans le style néo-scolastique de son prédécesseur.

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Dans la tête de… – Mélanie Chappuis

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Que pensent celles et ceux dont parlent les journalistes ? Mélanie Chappuis est partie de cette interrogation pour se mettre dans la tête des personnalités ou des anonymes qui ont fait l’actualité en 2013. D’Obama à Nabila, d’un pape démissionnaire à un enfant syrien, de Frigide Barjot à Jean Ziegler, l’écrivaine romande opère une plongée dans les pensées de personnes rendues personnages.
Que ressent une musulmane lorsqu’elle apprend que le Tessin a décidé d’interdire la burqa ? Quels sont les tiraillements du président américain après les attentats de Boston ? Comment l’intervention française au Mali influe-t-elle sur la virilité de François Hollande ? Comment Nicolas Sarkozy se justifie-t-il devant son épouse Carla Bruni lorsqu’on l’accuse d’avoir accepté de l’argent libyen pour financer sa campagne ? Que ressent un homosexuel parisien pendant les « manif pour tous » ? Ou une personne âgée à qui on refuse le droit de mettre fin à ses jours ? Plutôt qu’une approche journalistique, Mélanie Chappuis adopte une démarche littéraire afin de ressentir les tourments de ceux qui font l’actualité. Pour nous faire entendre ce qu’ils n’ont pas dit, elle se met à leur place, avec tendresse, humour, voire ironie.
Une série de portraits inattendus et intimes dressés avec talent, qui nous offrent le regard d’une auteure sur l’année écoulée. La plupart de ces chroniques ont été publiées dans le quotidien suisse le temps à partir de janvier 2013.
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Existe également au format numérique téléchargeable sur tous les types de liseuse

Les premières lignes
Dans la tête de…
Cécile B., spectatrice de son image

Une histoire d’amour, le film inspiré de la relation tumultueuse entre Cécile B. et le financier français Edouard Stern vient de sortir sur les écrans romands. Avec Benoît Poelvoorde et Laetitia Casta.

Mon amour, tu as vu, c’est Laetitia Casta qui va jouer mon rôle. Elle n’a rien d’une pute, tu vois, elle est pure, sensuelle. Émouvante. Comme moi avant, même si tu me traitais de pute, mon amour impitoyable. Toi, tu es interprété par Benoît Poelvoorde. Avoue que c’est moins classe. Il n’a rien de manipulateur ou de cruel, Poelvoorde. Rien d’excitant ou d’intimidant. Il a l’air fragile, pas assez sûr de lui. Rien à voir avec toi. Il a la peau toute fripée. Je l’ai remarqué sur la photo dans le journal. Une peau de vieux. D’homme qui ne fait pas son poids. Ce n’est pas beau d’être trop maigre à un certain âge. Toi, tu étais mince mais plein. Tu avais une belle peau ferme et poilue qui sentait bon. J’aimais appuyer mon visage contre elle, sentir tes poils crisser contre mon oreille, ton cœur battre. Et tes caresses dans mes cheveux. Ces moments étaient si précieux. Le réalises-tu aujourd’hui que tu es loin ? Toi, tu préférais ta combinaison à ta peau, à nos peaux. Tu préférais lorsqu’on se faisait du mal, que c’était pervers et méchant. Mais ensuite, parfois, il y avait nos moments de douceur et de beauté suprême.

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Offrir un livre dédicacé à Noël…

474blogC’est encore mieux si c’est un conte (presque possible) de Noël ! Nadine Fabry vous attend à la librairie Pax à Liège le jeudi 12 décembre à 18h30. La rencontre, animée par Béatrice Deru-Renard autour du troisième roman de l’auteur, Un lutin sur l’appui de fenêtre, est suivie d’une séance de dédicace.

Ne manquez pas non plus l’exposition «Françoise Lalande – l’exil bienfaisant» organisée par Hypothésarts à la Maison de la Culture de Namur. L’expo est visible du 13 décembre 2013 au 31 janvier 2014. Françoise Lalande (Nous veillerons ensemble sur le sommeil des hommes) vous attend au vernissage, le 13 décembre à 19 heures, entourée de ses livres et la plume affûtée.

Le 18 décembre, c’est à Genève qu’on fait la fête : Mélanie Chappuis (Maculée conception), Véronique Emmenegger (Cœurs d’assaut), Anne-Frédérique Rochat (Le sous-bois) et Laure Mi Hyun Croset (Polaroïds) vous attendent à 18h30 pour une Love X-Mas Party aux Salons de Théophile (13, rue de la Cité). Après un petit cocktail et des lectures, la séance de dédicace promet d’être animée !